« Le rossignol et le paon » de Jean-Pierre Claris de Florian

Le rossignol et le paon
L’aimable et tendre Philomèle,
Voyant commencer les beaux jours,
Racontait à l’écho fidèle
Et ses malheurs et ses amours.
Le plus beau paon du voisinage,
Maître et sultan de ce canton,
Elevant la tête et le ton,
Vint interrompre son ramage :
C’est bien à toi, chantre ennuyeux,
Avec un si triste plumage,
Et ce long bec, et ces gros yeux,
De vouloir charmer ce bocage !
A la beauté seule il va bien
D’oser célébrer la tendresse :
De quel droit chantes-tu sans cesse ?
Moi, qui suis beau, je ne dis rien.
Pardon, répondit Philomèle :
Il est vrai, je ne suis pas belle ;
Et si je chante dans ce bois,
Je n’ai de titre que ma voix.
Mais vous, dont la noble arrogance
M’ordonne de parler plus bas,
Vous vous taisez par impuissance,
Et n’avez que vos seuls appas.
Ils doivent éblouir sans doute ;
Est-ce assez pour se faire aimer ?
Allez, puisqu’amour n’y voit goutte,
C’est l’oreille qu’il faut charmer.
Jean-Pierre Claris de Florian

« Ô beaux yeux bruns… » de Louise Labé

Ô beaux yeux bruns
Ô beaux yeux bruns, ô regards détournés,
Ô chauds soupirs, ô larmes épandues,
Ô noires nuits vainement attendues,
Ô jours luisants vainement retournée !
« À son livre » de Joachim du Bellay
« 1909 » par Guillaume Apollinaire
« De l’amour », par Antonis Skiathas

De l’Amour
Depuis des siècles commence à chanter
la lune, dans la chaux du dépôt,
ta poitrine obtient la forme d’une tour
pierre de sel andalouse,
à tous les dortoirs qui séchaient,
la lavande, le thym, les fleurs sauvages
de la sauge,
depuis nos réverbérations
concentriques jusqu’à l’île de Symi.